Voisin C28 Aérosport 1935
Comment peut-on écrire un article aussi pauvre en photos ? Une première hélas nullement fortuite.
C'est qu'en réalité je ne sais comment m'exprimer. Un peu comme l'amateur de rock collé à ses écouteurs passe en boucle un morceau de Pink Floyd, un riff de guitare de Clapton ou de Knopfler, un morceau de jazz de Thelonious Monk, Miles Davis ou Isaac Hayes, un concerto classique de violon de Tchaikovsky ou de Max Bruch ou… bref imaginez la chose qui soit la plus délicieuse à vos oreilles. Je pourrais parcourir ainsi les cinq sens.
La C28 est l'une des voitures au volant de laquelle je m'imagine avec la Traction, la Dynamic, la Maserati 3500GT, la Facel HK500, la Citroën SM. Nulle prétention là-dedans, je n'ignore rien de ma modeste condition de passionné, j'exprime ici un rêve non interdit qui ne se réalisera probablement jamais.
La Voisin est à la Panhard ce que Le Corbusier est à un Mallet-Stevens mâtiné de Ruhlmann.
La Dynamic est la synthèse réussie d'un art déco flamboyant saupoudrant d'emphatiques rondeurs, d'une motorisation héritage éprouvé et d'une technologie moderne adoptée pour l'occasion, machine merveilleuse et étrange qui, à chaque rencontre, comble ma passion.
La C28 Aérosport 1935 est LA machine moderne, épurée, tracée d'un crayon anticonformiste qui, d'un trait vigoureux et pointu, raye le passé. Bourrée de technologies au design d'inspiration avionique, chaque détail est pensé pour que, dans une auto libérée de l'envie de plaire, la forme soit l'expression ultime de la fonction. Carrosserie ponton avant les pontons, ce dès 1935, dotée d'un toit ouvrant coulissant mû par un moteur à dépression, elle peut glisser à 150km/h dans le feulement caractéristique accompagné d'un nuage de fumée de son bloc sans soupapes à chemises fontes (plus rustiques mais moins fragiles que la Panhard) de 3300cm3 de cylindrée.
Un tracé net comme un coup de lame de canif dans les errements du passé
Inaccessible au profane, 14 exemplaires fabriqués supposés, d'une valeur d'un demi-million d'euros (si pas plus), déclassant par son style intégré les chars d'assaut Bugatti et autres Hispano-Suiza, elle reste pour moi le Saint-Graal de Rétromobile 2024. Il fallait que je parle d'elle 40 minutes avec le restaurateur Dominique Tessier qui l'a reconstruite, que dis-je, sculptée en pâte d'aluminium lissé sur le socle d'un châssis moteur, aidé des archives cotées Voisin. L'intérieur en cuir - comme il se doit dans une découvrable - est signé Hermès. Cinq mille heures pas moins ont été nécessaires pour un tel travail : réfection moteur, carrosserie, électricité, sellerie. Une perfection.
Seule voiture que je désirais détailler, j'ai été pris d'un vertige bicomposé de désabusement devant l'inaccessibilité d'une telle rareté et de retenue du gourmet refusant la vulgarité du touriste. Je n'ai pu prendre aucun des détails de cette merveille qui auraient récompensé mes efforts. Cet article sera donc indigent sauf de passion.
Je la retrouverai dans cinq ans, dans dix ans pour décomplexé, la détailler et compléter cet article.
Une Voisin, tout comme une Panhard, se mérite*.
Cordialement
* sur le plan de la passion bien sûr, quoi d'autre ?
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